Au milieu du XXe siècle le devenir des vestiges fortifiés fait l’objet d’une vaste réflexion de la part des pouvoirs publics. Neuf cents ans d’architectures fortifiées ont laissé de profondes traces dans le sol et marqué à jamais l’identité nationale.

La réhabilitation des ouvrages de défense en patrimoine culturel touristique débute réellement vers 1980. Un concept de sauvegarde du patrimoine est élaboré conformément aux chartes internationales en vigueur. Cette mise en valeur s’accompagne parallèlement d’un programme pédagogique d’interprétation du patrimoine. Ainsi, grâce à une promenade didactique, les visiteurs ont la possibilité de comprendre le sens historique de ces architectures.

Ces projets se concrétisent aujourd’hui par la réalisation de deux itinéraires culturels intitulés « Wenzel » et « Vauban » et par l’aménagement d’un Musée de la Forteresse dans l’ancien Fort Thüngen.

Depuis plusieurs années maintenant, le succès de ces projets permet aux visiteurs étrangers de découvrir un patrimoine fortifié classé patrimoine mondial de l’UNESCO en 1994.

Histoire de la Forteresse de Luxembourg 

L’histoire de la ville de Luxembourg est étroitement liée à ses fortifications. La construction de ses architectures débute au X° siècle avec l’édification du château médiéval et se termine 900 ans plus tard, en 1867, par le démantèlement de la puissante forteresse bastionnée.

 Le castellum Lucilinburhuc

Construit au X° sièclepar Sigefroid, le château de Luxembourg est considéré comme le berceau de la future ville de Luxembourg. Situé stratégiquement sur le promontoire rocheux du Bock, entre les méandres de la rivière Alzette et les anciennes routes commerciales romaines, le château reçut plusieurs constructions jusqu’au XIII° siècle. Sa fonction politique, économique et religieuse joua un rôle déterminant dans la sédentarisation d’une communauté. A partir de Conrad I (1059 – 1086), le château devint la résidence permanente des comtes de Luxembourg.

Les enceintes urbaines du Moyen Age

Le développement successif de trois enceintes fortifiées entre le X° et XV° siècle témoigne de l’essor de la cité au Moyen Age. La ville de Luxembourg, affranchie en 1244 par la comtesse Ermesinde, se développa considérablement à partir du XIV° siècle, grâce à ses activités agraires et artisanales, mais aussi, grâce à l’organisation d’une grande foire annuelle dénommée « Schueberfouer », encore célèbre aujourd’hui.

La forteresse bastionnée de Luxembourg se développe à partir du XV° siècle parallèlement aux évolutions de la poliorcétique.
Durant toute l’époque Moderne et une partie de l’époque Contemporaine Espagnoles, Français, Autrichiens et Prussiens vont renforcer cette ville-forteresse située aux frontières des états-nations naissants. Cette fuite en avant plonge la cité au cœur de la géopolitique européenne. Elle fut constamment l’objet de convoitises, de tractations et de discordes. En 1867, au traité de Londres, la forteresse est démilitarisée, démantelée et le pays déclaré indépendant.

La silhouette de la ville est encore aujourd’hui composée de ces strates historiques.

Du 15e au 19e siècle : Le Gibraltar du Nord

Entre le XVe et le XIXe siècle, la morphologie de la ville de Luxembourg fut considérablement bouleversée en raison des changements survenus dans l’art de mener la guerre : artillerie à poudre, tranchées d’approche, nombre important d’hommes de troupe. Ces bouleversements rendirent caduques les défenses fortifiées verticales du Moyen Age. Ainsi, sous l’égide de grands bâtisseurs, tels que Louvigny, Vauban, de Beauffe, la ville de Luxembourg fut durant plusieurs siècles adaptée aux méthodes géométriques de fortification bastionnée : bastions, ravelins, caponnières, casemates, places d’arme, chemins couverts, citadelle, échauguettes, etc.

L’extension et le perfectionnement des ouvrages militaires durant près de cinq siècles, ont fait de Luxembourg l’une des places fortes les plus redoutées d’Europe. Elle fut qualifiée à ce titre de véritable « Gibraltar du Nord ». Sa perte par les Français au traité de Ryswick devait faire dire à Vauban :
- « ces deux dernières places (Strasbourg et Luxembourg) sont les meilleures d’Europe. Il n’y avait qu’à les garder. Il est certain qu’aucune puissance n’aurait pu nous les ôter » 

Epoque espagnole (1555-1684)

Les menaces de guerre contre la France poussèrent les responsables espagnols à construire des redoutes et des contre-gardes sur le front Ouest.
Dans les faubourgs de la ville, au Grund et au Pfaffenthal, une centaine de maisons furent démolies, afin de contrôler l’accès à la ville haute. Les habitants furent relogés en ville et de nouvelles rues furent construites. Elles portent encore aujourd’hui les noms de personnalités espagnoles, tels que « Monterey, Louvigny, Chimay ».

Epoque française (1684–1697)

Lorsque Louis XIV s’empara de Luxembourg en 1684, il chargea le grand ingénieur- architecte Vauban, de fortifier la ville.
La quasi-totalité de la ville basse fut intégrée au système défensif de la ville haute et plusieurs ouvrages furent construits dans des zones périphériques mal défendues. Dans le même temps, il fit édifier plusieurs casernes pour le logement de la garnison, un hôpital et des entrepôts pour le ravitaillement des troupes. Les treize années passées par Vauban à renforcer la ville, accentua l’image de Luxembourg de place forte inexpugnable. 

Epoque autrichienne (1715–1795)

Lors du « Traité d’Utrecht » (1713-1715) et du règlement de l’affaire de la succession d’Espagne, le Luxembourg échut aux Habsbourgs d’Autriche.
Durant 40 ans, la ville fut renforcée et modernisée. De nouveaux forts furent construits autour de la ville et un réseau de casemates fut creusé sur trois niveaux dans le rocher du Bock. A côté de ces réalisations, les Autrichiens construisirent des ponts, des écluses et des dépôts militaires, mais surtout, ils creusèrent une vingtaine de kilomètres de galeries, de mines et de passages souterrains.

Epoque prussienne (1815–1867)

A la suite du Congrès de Vienne, le Duché de Luxembourg, devenu Grand-Duché, intégra la Confédération germanique. Les Prussiens entrèrent dans la forteresse et procédèrent à d’importants travaux de fortification.
On notera en particulier la construction de casernes, de deux hôpitaux militaires et de plusieurs bâtiments.
L’œuvre des Prussiens fut interrompue par le Traité de Londres de 1867 qui ordonna le démantèlement de la forteresse.

Le Traité de Londres de 1867

Le Traité de Londres de 1867 mit fin à neuf siècles de fortification luxembourgeoise. La forteresse fut démilitarisée, démantelée et le pays déclaré indépendant. Lors du Traité, les fortifications s’étendaient sur près de 180 hectares. Le démantèlement dura 16 années, de 1867 à 1883. Pour les citadins, la destruction des ouvrages fortifiés devait agir comme une libération. La ville, débarrassée de son carcan de fortifications, s’ouvrit de toute part et des grands travaux d’urbanisation furent entrepris sur les vestiges de la forteresse.

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